2005 / Fondation Miro, Barcelone, Espagne

“Once upon a time”, exposition personnelle du 16 décembre 2005 au 29 janvier 2006.

Commissaire d’exposition : Marie-Thérèse Champesme

L’univers de Laurent Pernot (°1980) est peuplé de présences intermittentes, de corps que l’on ne peut saisir puisqu’ils ne sont que des particules de lumière. La projection (vidéo ou diapositives) les rend visibles, faisant alors de nous les témoins émerveillés de leur apparition. Mais à peine sommes-nous touchés par leur présence qu’ils disparaissent à nouveau, rendus à l’obscurité. Ils  laissent parfois leur place à d’autres qui, à leur tour, nous interpellent puis disparaissent. Comme le dit Laurent Pernot, «ils clignotent entre la vie et la mort.»

Dans Particles (2004), des perles de verre captent la lumière ; en scintillant, elles offrent au spectateur la silhouette d’un corps humain en constante métamorphose.

Grâce aux images lumineuses projetées sur elle, la robe de mariée de For Ever  (2004) semble se mettre à vivre : un corps vient l’habiter, bientôt remplacé par un autre. Sommes-nous transportés dans le monde féerique de la Belle au Bois dormant ou dans le drame d’une nouvelle Eurydice, morte aussitôt après ses noces ? Ces images surgissent et s’évanouissent comme celles des songes, des fantasmes ou des souvenirs. Pour Laurent Pernot, «les vêtements sont une proie facile pour la mémoire, écrans de projections des souvenirs, toiles recouvrant les fantômes du passé.»
A proximité de la robe, de petits écrans suspendus montrent des visages. Chacun d’eux a été produit par la surimpression digitale de photographies trouvées dans des albums de famille. Une technique d’animation 3 D a ensuite été utilisée pour leur donner le mouvement. Nous sommes donc devant les visages de personnes qui n’existent pas, comme si la mémoire, en superposant les images, avait créé de nouvelles identités.

Dans Confusion (2004) où de multiples visages remplacent celui du personnage, Laurent Pernot continue cette réflexion. «Suis-je autre chose que la somme des personnages que les autres ont projetés sur moi ? La question de l’identité traverse chaque individu tout au long de son existence, maintes fois brouillée par les masques qu’il est nécessaire d’adapter pour son intégration en société. On est à la fois un homme et tous les hommes.»

La vidéo est un medium parfaitement adapté à cette méditation douce et mélancolique sur le visible et l’éphémère. Mais on retrouve dans les photographies de Laurent Pernot la même sensation d’évanescence : les silhouettes de personnages s’y fondent dans le paysage, dans les reflets et les éclats de lumière. La plupart des photographies projetées dans l’exposition ont été réalisées pour un projet de livre associant images et poèmes : Territoires de l’imaginaire. « Parcourir ce livre, dit Laurent Pernot, est comme traverser des rêves, bons ou mauvais ; un parcours solitaire à l’intérieur d’un monde poétique, où les images rapprochent à la fois le fantastique au merveilleux, le poétique à l’absurde, le végétal à l’organique, la fiction au fantasme, le corps au spirituel, l’action à l’intemporel, avec toutes les combinaisons possibles. Un espace aux frontières du réel, mais qui, inévitablement, se rapporte à lui.»

Marie-Thérèse Champesme



laurent pernot